Le 22 juin dernier, nous recevions un panel d’experts venus nous parler du renouveau de la scène foodie parisienne et française dans le cadre de nos Underground Sessions. Charles Znaty, l’un de ces experts et le PDG du célèbre groupe Pierre Hermé Paris, a accepté de nous parler plus longuement pour explorer les dessous d’une marque qui continue de séduire les gourmands les plus exigeants de Paris à Tokyo.
La naissance d’une marque
L’histoire de la marque, c’est avant tout l’histoire d’une rencontre entre un grand pâtissier (le célèbre Pierre Hermé, meilleur pâtissier du monde selon le classement des World's 50 Best Restaurants) et Charles Znaty, publicitaire et homme d’affaires de génie, à l’origine de la naissance de la Maison Pierre Hermé en 1997. Pour Charles, « dès le début, Pierre et moi sommes sur la même longueur d’ondes : nous voulons créer des choses nouvelles et surprendre. Vingt ans plus tard, je suis encore souvent étonné par l’inventivité des créations de Pierre… et il est aussi surpris par mes idées. Dès le début, nous avons cherché à proposer quelque chose de différent, avec des pâtisseries originales et une stratégie commerciale réinventée.
Qu'est-ce qui différencie une boutique Pierre Hermé en France ou au Japon. Est-ce que vous vous adaptez à la culture du pays ?
« À la fois beaucoup de choses… et finalement pas tant que ça. Quand nous avons ouvert nos premières boutiques à Paris, nous voulions vraiment que chacune soit unique. La première rue Bonaparte est très différente de celle de la rue de Vaugirard ou de la rue Cambon. Bien sûr, elles partagent une identité Pierre Hermé, mais chacune propose une atmosphère inédite. À partir de la boutique de la rue Cambon, c’est devenu plus difficile de proposer des boutiques complètement différentes, mais nous continuons à apporter des touches uniques.
En ce qui concerne nos boutiques à l’étranger, notamment au Japon où Pierre Hermé rencontre un grand succès, nous adoptons ce principe, mais sans chercher à nous adapter à une quelconque culture. Pour notre première boutique là-bas, nous avons fait appel à un architecte japonais : pas pour sa nationalité – il a travaillé, notamment, pour la boutique Colette ou le Printemps à Paris – mais parce que nous voulions une boutique différente. Mais nous n’avons pas de stratégie locale pour adapter notre offre à une culture : nos clients s’intéressent à la gastronomie et aiment ce que nous leur proposons. Nous ne faisons pas dans la grande consommation. Je donne souvent l’exemple d’un chef japonais qui viendrait s’installer à Paris et proposerait des sushis… au camembert. Et bien non merci ! Pour moi, il faut savoir ce que l’on sait faire, ce que l’on peut faire et s’y tenir. »
Pouvez-vous nous parler des boutiques « Macarons & Chocolats ? Comment s'inscrivent-elles dans votre démarche internationale ?
« En fait, tout est parti d’un problème plutôt prosaïque : la pâtisserie est difficile à transporter. Pour proposer les spécialités et les nouveautés Pierre Hermé, nous devons pouvoir les fabriquer sur place, or il est de plus en plus difficile de trouver des baux de boulangeries-pâtisseries dans les quartiers passants ou touristiques. Et puis j’ai toujours cru au macaron : en 1993, j’avais d’ailleurs déposé le nom La Maison du Macaron (que je n’ai jamais utilisé). Du coup, l’idée s’est imposée assez facilement et nous avons ouvert notre première boutique Macarons & Chocolats, rue Cambon. À l’époque, un grand patron de l’industrie agro-alimentaire m’a assuré que ça ne marcherait jamais… Il avait tort ! Ça confirme bien que les gens ont de l’imagination et qu’ils adhèrent à une idée si le produit est bon et de qualité. Le principe est simple : nos produits sont fabriqués en Alsace et livrés dans nos boutiques.
Notre site Internet rencontre aussi un franc succès grâce, notamment, à notre emballage réfrigérant qui permet de conserver la fraîcheur des macarons et des chocolats jusqu’à la livraison. Je crois beaucoup à l’avancée de la technologie dans le domaine de la livraison – quand on voit qu’au Japon on peut aujourd’hui se faire livrer une glace, je me dis qu’on a encore des progrès à faire !
À ce propos, quelles sont vos ambitions pour l'avenir ?
« Déjà, j’espère bien continuer à m’amuser. Continuer à surprendre Pierre et à proposer des nouveautés. Pierre Hermé est respecté sur les marchés français et japonais, et nous comptons bien continuer à avancer dans ces deux pays. Il y aussi pas mal d’opportunités en Europe ou ailleurs, mais une chose est sûre : nous ne sommes pas une marque à l’ambition hégémonique. Nous n’allons pas chercher à conquérir le monde, de Beijing à NYC, en adoptant des stratégies commerciales complexes et agressives. Pour moi, rien ne vaut une idée simple et de qualité, qui marche vraiment. Et nous sommes, bien sûr, toujours à l’écoute des nouveautés, des avancées dans le domaine des technologies aux nouveaux services. Qui sait, peut-être qu’on verra bientôt un pop-up Pierre Hermé ouvrir à Paris avec Appear Here ! »